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LE COLLIER DES JOURS

La musique des Maîtres Chanteurs est particulièrement difficile à jouer au piano et Wagner n’est pas très habile pianiste. Richter le sait : aussi est-il extrêmement agité et suit-il le jeu du Maître, avec anxiété. Il connaît, lui, les passages les plus arides, il pressent l’accord que la main trop petite du Maître ne va pas pouvoir embrasser. De temps à autre, il ne peut s’en empêcher : il se précipite au clavier, sauve un effet qui allait manquer, complète une harmonie, frappe un accord, par-dessus les doigts qui hésitent.

Je ne suis pas sûre que cette intervention de terre-neuve n’agace pas un peu Wagner… Elle est bien inutile, d’ailleurs, car aucun virtuose n’aurait pu rendre comme le fait l’auteur le sens profond et l’intime délicatesse de son œuvre. Oh ! quelle joie ! quelle reconnaissance ! Les Maîtres Chanteurs sont absous, Wagner n’a plus de doutes.

Maintenant, on ébauche des projets. Servais est en relations d’amitié avec le directeur du Théâtre de la Monnaie à Bruxelles, et aussi avec Brassin, directeur du Conservatoire, qui est un wagnérien fanatique : on pourrait, si le Maître le permet, essayer d’organiser des représenta-