pait très vite, et la pente qui, couverte de buissons, dégringolait vers l’eau, avait un aspect de petit précipice très pittoresque, et rien n’était plus agréable à voir que les taches d’azur formées par le lac à travers l’emmêlement des branches. Les enfants avaient appelé ce coin, où, par crainte des chutes, on leur interdisait d’aller seuls, « le parc aux brigands », et l’on en racontait long sur les drames qui devaient s’y passer, quand le soir tombait.
Au moment où j’allais sortir du couvert des arbres, l’aînée des fillettes m’aperçut et courut à moi, en me faisant des signes étranges pour me recommander le silence et le mystère. Quand elle m’eut rejoint, elle m’entraîna, toujours sans parler, à travers les massifs, où je faillis laisser mon chapeau, vers une sorte de cabinet de verdure, tout proche de la maison, où l’on avait servi le café.
Le Maître était là, assis dans un fauteuil de jonc, fumant un cigare. Cosima, debout, regardait par les interstices des buissons et me fit signe de ne pas parler ; mais Wagner, en me jetant un regard farouche, dit à demi-voix :
— Comment ! c’est vous qui m’amenez ces gens-là ?