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LE COLLIER DES JOURS

— Un cerveau comme celui-là est vite suggestionné : en un clin d’œil, il va jusqu’aux dernières limites des conséquences possibles. Villiers se croit certainement enragé, et comme, le cas échéant, il est dangereux d’attendre, il va courir comme cela, tout d’une haleine, jusqu’à Lucerne et faire cautériser la plaie.

— La plaie ?… Mais il n’y a rien !…

Wagner est désagréablement affecté. Villiers, dont il a tant de peine à comprendre les discours, l’inquiète ; il ne parvient pas à s’expliquer ce caractère.

Pourtant on prend le parti de rire : le coupable involontaire, le bon Russ, est parfaitement bien portant et il n’y a aucun danger…

Le lendemain, quand, assez penaud, Villiers revient à Tribschen, du plus loin qu’il l’aperçoit, Wagner, feignant la terreur, s’écrie :

— Il est enragé ! il est enragé !

Et, tandis que Villiers rit jaune, il se met à courir en criant :

— Ne me mordez pas !

Puis, avec une agilité extraordinaire, comme pour échapper au danger, il grimpe jusqu’au sommet d’un sapin !…