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Page:Gautier - Le Vieux de la montagne, Armand Colin et Cie, 1893.djvu/44

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qu’aux lèvres, la splendeur des yeux, sombres et brillants comme une nuit d’été, les fauves lueurs des cheveux, ni blonds ni noirs, mais d’une étrange couleur de cuivre rouge, plus que toute cette séduction souveraine qui le brûle de si torturants désirs. Et, à voir ce fantôme, l’émotion le fait haleter :

— Ah ! si le diable peut être ainsi, que je sois damné !

Mais, aussitôt, il se dresse, épouvanté du blasphème. Il n’a rien dit. Ses lèvres n’ont rien formulé : il n’est coupable qu’en pensée.

Tout s’est dissipé. L’ogive de la fenêtre se découpe, à présent, d’un gris de perle : c’est le jour.

Hugues retombe sur son lit ; la raison lui revient, un peu de calme. Il comprend qu’il n’y a rien de diabolique dans tout cela, qu’un exorcisme ne le délivrerait pas, mais qu’il est follement épris, sans rémission et sans espoir, d’un être inconnu et insaisissable, que la mort est son seul salut.

Ce jour-là surtout, la vie, il lui semble, est impossible à supporter : c’est comme un poids trop lourd qui pèse sur sa poitrine, gêne sa respiration.