Page:Gautier - Le Vieux de la montagne, Armand Colin et Cie, 1893.djvu/85

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ment de quoi il s’agissait : la renommée du Vieux de la Montagne, le redoutable sorcier aux vengeances implacables, était venue jusqu’à eux, et ils avaient entendu conter à son sujet de très terribles histoires.

Le brouhaha était prodigieux dans la rue de David, au Change des Latins, et surtout dans la rue du Temple. C’était, porté sur un bourdonnement grave, un jacassement de volière, traversé d’appels de cor, de cris, de hennissements : une confusion joyeuse, avec des instants d’effroi, quand des chevaliers, arrivant par les rues étroites, bousculaient les piétons, et éperonnaient leurs chevaux cabrés.

Sous les voûtes des boutiques, les marchands, en tuniques brunes ou grises, se tenaient debout, les pieds au niveau de leur étalage, enviés de tous, car ils dominaient la multitude et voyaient par-dessus les têtes.

De belles étoffes de couleurs gaies étaient tendues çà et là, d’un toit à l’autre, et palpitaient doucement au-dessus des rues, qu’elles abritaient du soleil. Le flot vivant, sous ces vélums, apparaissait zébré de larges zones de lumière et d’ombre qui avivaient ou éteignaient l’éclat des