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XV

MALARTIC À L’ŒUVRE


Si la colère du duc en rentrant chez lui avait été vive, celle du Baron ne fut pas moindre en apprenant l’équipée de Vallombreuse à l’encontre d’Isabelle. Il fallut que le Tyran et Blazius lui tinssent de longs raisonnements pour l’empêcher de courir à l’hôtel de ce seigneur dans le but de le provoquer à un combat qu’il eût certainement refusé, car Sigognac n’étant ni le frère, ni le mari, ni le galant avoué de la comédienne, il n’avait aucun droit à demander raison d’un acte qui d’ailleurs s’excusait de lui-même. En France, il y a toujours eu liberté de faire la cour aux jolies femmes. L’agression du spadassin sur le Pont-Neuf était, à coup sûr, moins légitime ; mais, bien qu’il fût probable que le coup vînt de la part du duc, comment suivre les ramifications ténébreuses qui reliaient cet homme de sac et de corde à ce magnifique seigneur ? Et, en supposant même qu’on les eût découvertes, comment les prouver, et à qui demander justice de ces lâches attaques ? Aux yeux du monde, Sigognac, cachant sa qualité, était un vil histrion, un farceur de bas étage qu’un gentilhomme comme Vallombreuse pouvait, à sa fantaisie, faire bâtonner, emprisonner