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Page:Gautier - Les Cruautés de l'Amour, E. Dentu, 1879.djvu/175

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les cruautés de l’amour

avaient déposé le coffre devant la porte pour détourner les soupçons. Elle commença donc, avec l’aide de sa grand’mère, à composer une lettre où elle expliquait aux magistrats de la ville ce qui s’était passé. L’écrit n’était pas encore terminé que le gong retentit de nouveau, frappé avec violence, et en même temps une foule de pages, d’écuyers, de porteurs de lanternes, envahirent le jardin et se rangèrent en haie de chaque côté de l’allée.

Les deux femmes, stupéfaites, s’étaient avancées sous l’auvent de la maison. Elles virent venir un mandarin de premier rang en grand costume de cour, suivi de deux hommes, l’un portant le parasol d’honneur, l’autre un sceau de cristal sur un coussin de soie.

Le mandarin alla droit à la jeune fille et plia le genou devant elle.

— C’est bien toi que l’on nomme Lon-Foo ? demanda-t-il humblement.

— Oui… balbutia Lon-Foo toute tremblante.

— Eh bien, jeune fille plus heureuse que toutes les femmes du royaume, beauté privilégiée à laquelle je ne puis parler qu’à genoux, sache que celui dont tu as reçu ce matin les présents, celui qui m’envoie vers toi est l’homme devant qui tout ploie et tremble, le maître de notre vie à tous, l’empereur de la Chine !