Page:Gautier - Les Grotesques, 1856.djvu/384

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nicher Jupiter de son taudis aérien, et se propose de faire déloger tous les hôtes des maisons étoilées. Il n’a besoin de personne pour cette entreprise ; il en aura tout seul le péril et l’honneur. Typhon entend ces fanfaronnades avec joie, et toute la bande démesurée pousse des acclamations en signe d’acquiescement. Mimas se met à braire d’aise, Porphyrion étend ses griffes de bête fauve ; Polybotte, au groin de baleine, grogne pesamment ; Asie, le grand assommeur d’ours, Thoon, Ephialte, Coée, Japet, Echion, Almops, se mettent à crier comme des enragés : Vive Typhon ! Malheur aux dieux !

Pendant ce temps-là, Jupiter tempête et jure dans son Olympe comme un charretier dans un chemin creux de Basse-Bretagne. On fait la revue des munitions qui ne sont pas très-considérables, et l’on députe le factotum Mercure au dieu qui produit les exhalaisons. Celui-ci ne veut pas d’abord en donner à crédit, on lui doit déjà beaucoup, car au ciel on ne paye personne ; cependant, vu l’urgence du danger, il répond qu’il va en faire monter de quoi contenter maître Jupin. — Mercure, chemin faisant, met dans sa poche la Gazette et l’Extraordinaire qui renferment des détails sur les forces des géants.

Le conseil des dieux ressemble beaucoup à un conseil terrestre ; on s’y dispute d’abord sur le pas et la préséance. Neptune, qui n’est pas grand orateur et ne sait que gronder, s’embrouille dans son discours ; Mars fait le capitaine Fracasse, le tranche-montagne : au seul vent de sa tueuse il renversera l’armée des géants. Vulcain s’offre à fabriquer pour les fenêtres et les portes de l’Olympe des grilles et des serrures si compliquées, que