Aller au contenu

Page:Gautier - Les Grotesques, 1856.djvu/383

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des fours, de ces poitrines plus profondes que des cavernes. Mercure pensa en rendre le sang par les oreilles, comme un canonnier qui a manœuvré sa bombarde toute la journée. — Sauve-toi vite, bélître, maroufle, ou je te jette tout vif dans le feu, hurle Typhon. Je me moque de ton maître et de ses fusées et pétarades comme de colin-tampon. — Là-dessus, le colosse se met à dévorer avec sa bande des montagnes de viande à moitié grillée, et ne tarde pas à s’endormir auprès du feu qui s’éteint, après avoir mis sous sa tête, en guise d’oreiller, un rocher que vingt mille hommes n’auraient pas fait bouger d’un pouce. Ainsi se termine le premier chant.

Le pauvre Mercure, fort effrayé, grimpe sur un arbre où il se perche jusqu’au retour de l’aurore, les chemins étant peu sûrs et infestés de tire-laines. Le jour venu, il descend de son juchoir et se remet en route ; il trouve Jupiter encore au lit, et ce dieu se donne à peine le temps de passer une robe de chambre, tant il est pressé de savoir les nouvelles que son messager apporte de la terre. — Tout ce que j’ai pu obtenir, dit Mercure au maître des dieux, c’est la chanson de Daye-Dandaye. Ces faquins m’ont éclaté de rire au nez comme un cent de mouches, et peu s’en est fallu qu’ils ne me bernassent. Typhon en particulier m’a accueilli comme un cueilleur de pommes du Perche. Que j’aie la gale qui dure sept ans si je n’ai dit la vérité aussi nue qu’au sortir de son puits !

Le conseil céleste s’assemble, et l’on agite la question de savoir s’il faudra sévir ou non. De leur côté, les géants se consultent et se démènent. Encelade, dont le nom fournit la plus heureuse rime à escalade, veut absolument dé-