Page:Gautier - Les Roues innocents.djvu/142

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pas de se sauver, ni l’araignée qui consolait Pélisson, ce qui ne l’empêchait pas de s’ennuyer beaucoup.

Laissez-moi vous mettre au courant des faits, mais vous avez peut-être déjà deviné.

Je suis de la garde nationale ; quand je dis que j’en suis, je me trompe, je devrais en être. Si j’en étais, je ne serais pas où je suis. Mais, ma parole d’honneur, ce n’est pas ma faute ; mon éducation a été complètement faussée à l’endroit de cette institution ; j’ai bu le lait de l’insubordination dans le shako de mon père, le plus mauvais garde national connu ; je soupçonne même ce shako de n’avoir jamais servi qu’à cela. Je dois dire que, jusqu’au 29 du mois dernier, cette insubordination m’a parfaitement réussi. Ce n’est pas faute d’avoir reçu des billets de garde, j’en pourrais faire un album, si je les avais gardés. Ce n’est pas faute non plus d’avoir été cité devant le conseil de discipline, voire même d’y avoir été condamné ; mais tantôt une fuite intelligente, tantôt un déménagement heureux, tantôt la fête du roi, tantôt la naissance d’un prince (je parle du règne de Louis-Philippe) ; ou bien une Constitution nouvelle, ou bien une