Page:Gautier - Les jeunes France, romans goguenards.djvu/103

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

pas une seconde ; vous aurez donc l’extrême obligeance de vous en contenter.

Donc continuons cette véridique et singulière histoire. Le merveilleux sortit pendant l’entr’acte, le très-ordinaire Daniel Jovard sortit aussi ; les merveilleux et les ordinaires, les grands hommes et les cuistres font souvent les mêmes choses. Le hasard fit qu’ils se rencontrèrent au foyer. Daniel Jovard salua Ferdinand le premier, et s’avança vers lui ; quand Ferdinand aperçut ce nouveau paysan du Danube, il hésita un instant, et fut près de pirouetter sur ses talons pour n’être pas obligé de le reconnaître ; mais un regard jeté autour de lui l’ayant assuré de la profonde solitude du foyer, il se résigna, et attendit son ancien camarade de pied ferme ; C’est une des plus belles actions de la vie de Ferdinand de C***.

Après quelques paroles échangées, ils en vinrent naturellement à parler de la pièce qu’on représentait. Daniel Jovard l’admirait bénévolement, et il fut on ne peut pas plus surpris de voir que son ami Ferdinand de C***, en qui il avait toujours eu grande confiance, était d’une opinion tout à fait différente de la sienne.

— Mon très-cher, lui dit-il, c’est plus que faux-toupet, c’est empire, c’est perruque, c’est rococo, c’est pompadour ; il faut être momie ou fossile, membre de l’Institut ou fouille de Pompéi pour trouver du plaisir à de pareilles billevesées. Cela est d’un froid à geler les jets d’eau en l’air ; ces