Page:Gautier - Les jeunes France, romans goguenards.djvu/334

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amants et aux voleurs, en faveur de qui la milice urbaine a été certainement inventée ; il dit aussi que ce n’est pas la peine de payer quatre cent mille fainéants, qui n’ont d’autre occupation que de regarder sur les boulevards les confrères de Bilboquet, et de courtiser les bonnes d’enfants dans les jardins publics, si l’on doit faire leur besogne soi-même.

Il prétend que jamais on ne lui a envoyé de tourlourous pour écrire son feuilleton, et qu’alors il ne doit pas faire la faction des susdits tourlourous.

Nous ne voyons pas trop ce que l’on pourrait répondre à ce raisonnement.

Un autre motif qu’il donne, et qui est assez plausible, c’est que, s’il avait les trois cents francs qu’il faut pour s’équiper, il s’empresserait d’acheter un habit noir pour remplacer le sien, dont les coutures blanchissent, dont les boutons s’éraillent. Il se procurerait des bottes sérieuses, car les siennes rient aux éclats, et rien n’est plus sot qu’un sot rire, s’il faut en croire le proverbe grec ; il commanderait aussi un pantalon à son tailleur, afin de restaurer un peu son élégance, qui périclite visiblement.

Ensuite, il lui répugne de paraître déguisé dans les rues en dehors des jours de carnaval, surtout quand le déguisement consiste en un bonnet de sauvage, un habit indigo, relevé d’agréments sang de bœuf, écartelé de buffleteries badigeonnées au blanc d’Espagne, avec une giberne qui vous bat l’opposé du devant, un briquet et une baïonnette, gigantesques breloques placées à l’envers, qui vous tam-