Page:Gautier - Les jeunes France, romans goguenards.djvu/342

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jette dans une voiture et se sauve chez des parents qu’il a dans une banlieue quelconque ; ses habits ne lui parviennent que deux jours après ; pendant tout ce temps, il est resté roulé dans une couverture, l’habit de son parent étant beaucoup trop étroit pour lui.

Cette vive alerte le fait redoubler de surveillance ; la consigne des portiers est plus sévère que jamais : il faut, pour parvenir jusqu’à lui, un mot d’ordre, une manière cabalistique de sonner ; les gens les plus connus deviennent suspects au cerbère, qui ne laisse passer personne ; votre père est renvoyé comme mouchard ; votre meilleur ami, comme garde municipal.

Quelques jours après, le réfractaire reçoit des lettres dans ce genre :

« Mon chéri,

« Je suis venue l’autre jour pour te voir et passer une partie de la journée avec toi ; nous aurions été dîner ensemble, et ensuite au spectacle ; j’étais libre jusqu’à demain… ; jusqu’à demain ! pleure de rage en y songeant.

« Mais ton portier n’a pas voulu me laisser monter : il a prétendu que tu n’y étais pas, et que, d’ailleurs, je devais être un gendarme déguisé.

« Que veut dire cette folie ? Ah si tu me trompais, je saurais me venger.

« Alida. »