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paysage mêlées d’architecture et représentant des points de vue, des sites royaux ou de simples fantaisies pittoresques, traités avec une liberté de brosse et une puissance d’effet extraordinaires ; car ce grand homme fait tous les genres avec la même supériorité.

L’école espagnole peut se résumer en quatre peintres : Velasquez, Murillo, Ribera et Zurbaran.

Velasquez représente le côté aristocratique et chevaleresque ; Murillo, la dévotion tendre et coquette, l’ascétisme voluptueux, les Vierges roses et blanches ; Ribera, le côté sanguinaire et farouche, le côté de l’inquisition, des combats de taureaux et des bandits ; Zurbaran, les mortifications du cloître, l’aspect cadavéreux et monacal, le stoïcisme effroyable des martyrs. Que Velasquez vous peigne une infante, Murillo une Vierge, Ribera un bourreau, Zurbaran un moine, et vous avez toute l’Espagne d’alors ; moins les pauvres, dont tous les quatre excellent à rendre les haillons et la vermine.

Bartolomé Esteban Murillo, né à Séville en 1618, fut disciple de Juan del Castillo, et se perfectionna ensuite à Madrid en étudiant les tableaux classiques du palais royal. Il eut trois manières distinctes, mais non pas assez différentes pour que son originalité ne soit pas toujours aisément reconnaissable ; on divise ses ta-