Page:Gautier - Lucienne, Calmann Lévy, 1877.djvu/189

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un peu dit ce que vous valez, et qu’elle fera bien (Je répandre ses bienfaits sur d’autres que sur vous.

Le père Grialvat jeta un regard rapide du côté de Lucienne, et il changea aussitôt l’expression de son visage.

— Vous avez mal agi, la mère, si vous avez fait ça, dit-il ; mais vous vous vantez ; vous êtes ben trop bonne pour vouloir la mort du pécheur. Vous savez ben que, si j’étais un peu aidé, si mon bien était libéré, je reprendrais courage et je travaillerais comme les autres. Ce n’est pas vous qui auriez arrêté quelqu’un qui voulait me tirer de l’ornière.

— Allons donc ! vous, travailler. Vous êtes un ivrogne et un paresseux incorrigible.

— Ne l’écoutez pas, ma belle demoiselle, dit-il en s’approchant de Lucienne. Elle a une dent contre moi ; sans ça elle ne parlerait pas comme elle fait. Elle sait bien qu’il n’y a pas pus honnête que moi et que c’est le guignon qui me tient.

— Allons, laissez mam’selle tranquille ! s’écria la mère Bourguignon.

— On ne peut pourtant pas se laisser voler comme dans un bois et arracher le pain de la bouche ! s’écria Grialvat exaspéré ; v’la une bonne dame qui voulait me secourir, et vous vous mettez à la traverse ; vous la détournez d’un pauvre homme comme moi, qui ai trois petits enfants à nourrir.

— Est-ce vrai qu’il a d’autres enfants ? demanda Lucienne à l’hôtesse.