Page:Gautier - Mémoires d'un Éléphant blanc, Armand Colin et Cie, 1894.djvu/168

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— Oui, monsieur John Harlwick, je resterai.

Et, sauf M. Oldham, la troupe s’éloigna en bon ordre.

J’examinai curieusement M. Oldham ; c’était un singulier jeune homme : il était grand et maigre ; les jambes très longues, les bras très longs aussi ; et il avait des mains énormes.
je jouais avec le gros anneau de fer.
La tête était assez petite ; la bouche se fendait jusqu’aux oreilles, et les joues saillaient étrangement. En attendant qu’on débarquât les bagages de ses compagnons, M. Oldham arpentait le quai à grands pas un peu impatient et grommelant des mots indistincts, où je ne comprenais rien.

J’étais désolé que Moukounji fût absent.

— Ces étrangers, pensais-je, doivent avoir de nombreux bagages, peut-être fort lourds, et certainement si mon maître était là, nous trouverions du travail.

Tout en réfléchissant ainsi, je jouais machinalement avec un gros anneau de fer qui était à mes pieds. Il avait été jadis scellé dans le sol ; mais il ne tenait presque plus, et, en jouant, je l’avais involontairement arraché. Je m’amusais, maintenant, à le faire sauter en l’air, et quand il retombait, je le recevais au bout de ma trompe. Tout à coup les regards de M. Oldham tombèrent sur moi ; et il se mit à m’observer attentivement. Le jeu qui m’occupait sembla l’intéresser fort, et il demanda à un des hommes attachés au service du port :