Page:Gautier - Militona, Hachette, 1860.djvu/162

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la course du lendemain, plutôt par la force de l’habitude que par un dessein bien arrêté.

Il y était encore et traversait l’arène, lorsque Argamasilla et Covachuelo arrivèrent suivis de leur petite escouade.

Covachuelo, avec la plus grande politesse et les formules les plus cérémonieuses, notifia à Juancho qu’il eût à le suivre en prison.

Juancho haussa dédaigneusement les épaules et poursuivit son chemin.

Sur un signe de l’alguazil, deux agents se jetèrent sur le torero, qui les secoua comme un grain de poussière qu’on fait tomber de sa manche.

Toute la bande se rua alors sur Juancho, qui en envoya trois ou quatre rouler à quinze pas les quatre fers en l’air ; mais, comme le nombre finit toujours par l’emporter sur la force personnelle, et que cent pygmées ont raison d’un géant, Juancho, tout en rugissant, s’était peu à peu rapproché du toril, et là, se débarrassant par une brusque secousse des mains qui s’accrochaient à ses habits, il en ouvrit la porte, se précipita dans ce dangereux asile et s’y enferma, à peu près comme ce belluaire qui, poursuivi par des gardes de commerce, se réfugia dans la cage de ses tigres.

Les assaillants essayèrent de le forcer dans cette retraite ; mais la porte qu’ils tâchaient d’enfoncer se renversa tout à coup, et un taureau, chassé de son