Page:Gautier - Poésies de Th. Gautier qui ne figureront pas dans ses œuvres.djvu/66

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Oh ! non ! n’en veuillez pas, sire, à votre famille
De n’avoir pas formé, sous le rayon qui brille,
Un groupe filial,
Pour recevoir, au seuil de son apothéose,
Comme Hercule ayant fait sa tâche grandiose,
L’ancêtre impérial !


Vos malheurs sont finis ; toujours durent les nôtres.
Vous êtes mort là-bas, enchaîné, loin des vôtres,
Titan sur un écueil ;
Pas de fils pour fermer vos yeux que l’ombre inonde ;
Même ici, nul parent, — oh ! misère profonde ! —
Conduisant votre deuil !


Montholon, le plus cher comme le plus fidèle,
Jusqu’au bout, du vautour affrontant les coups d’aile,
Vous a gardé sa foi ;
Près du dieu foudroyé, qu’un vaste ennui dévore,
Il se tenait debout, et même il est encore
En prison avec moi.

 
Un navire, conduit par un noble jeune homme,
Sous l’arbre où vous dormiez, Sire, votre long somme,
Captif dans le trépas,
Est allé vous chercher avec une escadrille ;
Mais votre œil sur le pont cherchait votre famille
Qui ne s’y trouvait pas.

 
Quand la nef aborda, France, ton sol antique,
Votre âme réveillée à ce choc électrique,
Au bruit des voix, des pas,
De sa prunelle d’ombre entrevit dans l’aurore,
Palpiter vaguement un drapeau tricolore
Où l’aigle n’était pas.