Page:Gautier - Quand on voyage.djvu/188

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fications, et fait la difficile quand on vient frapper à sa porte le soir. — Il nous fallut attendre une grande heure devant la porte, pour nous ne savons quelles minutieuses formalités de police ; puis enfin on leva la barrière de bois, espèce de herse pacifique qui barre l’arcade, et la voiture put rouler sur le pavé cyclopéen de Florence. — Nous disons cyclopéen parce que, comme les murs qui portent ce nom, il est composé de pierres de figures inégales, s’agençant par les angles, ainsi que des morceaux de casse-tête chinois.

Pour une ville de fête et de plaisir, dont le nom jette un parfum comme un bouquet, Florence nous fit une étrange réception, et qui eût pu faire reculer un plus superstitieux par son apparence de mauvais présage.

Dans la première rue par laquelle déboucha la diligence, nous rencontrâmes une apparition aussi effrayante que celle de la charrette des Cortès de la mort faite par l’ingénieux chevalier de la Manche aux environs du Toboso ; seulement, ici, il ne s’agissait pas des décorations d’un auto-sacramental, mais d’une affreuse réalité.

Deux files de spectres noirs masqués, portant des torches de résine d’où s’échappaient des flots de lumière rougeâtre mêlée de fumée épaisse, marchaient ou plu-