Page:Gautier - Quand on voyage.djvu/202

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plus romaine, Paris plus parisien, Venise plus vénitienne, Madrid plus espagnol, Londres plus anglais, Naples plus napolitain, dans cet endroit privilégié que partout ailleurs. L’œil de Florence est la place du Grand-Duc : — un bel œil !

En effet, supprimez cette place, et Florence n’a plus de sens ; Florence pourrait être une autre ville. C’est donc par cette place que tout voyageur doit commencer ; et, d’ailleurs, n’en eût-il pas le dessein, les flots des promeneurs l’y porteraient et les rues l’y conduiraient d’elles-mêmes.

Le premier aspect de la place du Grand-Duc, d’un effet si gracieux, si pittoresque, si complet, vous fait comprendre tout de suite dans quelle erreur tombent les capitales modernes comme Londres, Paris, Saint-Pétersbourg, qui forment, sous prétexte de places, dans leurs masses compactes, d’immenses espaces vides sur lesquels échouent tous les modes possibles et impossibles de décoration. On touche du doigt la raison qui fait du Carrousel et de la place de la Concorde de grands champs vagues qui absorbent sans fruit des fontaines, des statues, des arcs de triomphe, des obélisques, des candélabres et des jardinets. Tous ces embellissements, très-jolis sur le papier, fort agréables aussi sans doute vus de la nacelle