Page:Gautier - Quand on voyage.djvu/324

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noncer, le temps nous pressait. Parti par le convoi du matin, nous devions reprendre le convoi du soir ; nous n’avions pas dîné, et nous ne savions trop comment retourner à la station, où notre repas commandé nous attendait. En errant, nous débouchâmes sur une place d’un aspect pittoresque. Une des portes de la ville, avec son bloc de tours à mâchicoulis, en occupait un des côtés ; à l’opposite, une église d’apparence romane recevait un coup de soleil si à propos, que les détails de sa façade en prenaient un relief extraordinaire. De vieilles maisons, portant sur des piliers qui formaient galerie, garnissaient les autres côtés. À l’angle d’une ruelle donnant sur la place, un omnibus dételé se reposait nonchalamment. Ce ne fut pas sans de grands frais d’éloquence que nous déterminâmes le cocher qu’on était allé chercher, et qu’on interrompit dans une promenade sentimentale avec sa novia (fiancée), à harnacher un cheval et à l’accrocher à la machine, tant notre idée lui semblait absurde.

Un second discours le décida, non sans peine, à placer le deuxième cheval près du premier. Tout en se trémoussant autour de ses bêtes, il faisait des objections : « Le convoi ne passerait que dans une heure et demie ; il valait mieux attendre. Prendre un omnibus à soi tout