Page:Gautier - Quand on voyage.djvu/48

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Le feu d’artifice tiré sur la mer, où frissonnaient, en paillettes d’argent, les reflets des bombes lumineuses, était bien beau, sans doute ; mais il se perdait un peu entre la double immensité du ciel et de l’Océan, du moins pour les spectateurs qui, comme nous, le regardaient de la rive ; il eût fallu des fusées colossales chargées de quintaux de poudre.

Celui de la place d’Armes nous fit beaucoup de plaisir, car nous étions assez près pour n’en perdre aucun détail. Nous professons pour les feux d’artifice une passion toute chinoise. N’est-ce pas le paroxysme de la couleur, le blanc, le jaune, le bleu, le rouge, le vert, le violet portés à leur dernier degré de puissance ; des vitraux qu’éclaire un incendie, des saphirs, des rubis, des topazes, des émeraudes en conflagration ? Et quelles courbes élégantes décrivent sur le noir profond de la nuit les chandelles romaines, les bombes à pluie d’argent ou d’or !

La pièce principale représentait, tracée par un contour de feu, la statue équestre de Napoléon Ier par M. Leveel, dont l’original en bronze domine la mer du haut de son piédestal granitique.

Après le feu d’artifice, une surprise nous attendait au camp de la gare ; on avait improvisé un théâtre et une