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les maîtres chanteurs

— Il gagnerait pourtant l’héritage du monde celui qui pourrait, avec l’or, forger un anneau ; mais, pour acquérir ce pouvoir, il lui faudrait d’abord renoncer à l’amour. C’est pourquoi nous n’avons nulle crainte que notre jouet nous soit dérobé, car tout ce qui vit veut aimer. Nul ne consent à renoncer aux ivresses de l’amour — et, moins que tout autre, Alberich le Nibelung, qui se meurt presque de convoitise amoureuse.

Mais le nain a écouté avec une profonde attention le babillage des ondines qui viennent imprudemment de dévoiler le secret de l’or. Il grimpe de cime en cime, glisse, retombe, s’acharne ; mais bientôt s’écrie d’une voix terrible :

— Raillez, maintenant, Nixes perfides ; vous folâtrerez désormais dans l’obscurité, car j’arrache au récif l’or miraculeux. Je forgerai l’anneau vengeur, et que le flot l’entende ici : — Je maudis l’amour.

Et le nain plonge et disparaît avec sa proie