Page:Gautier - Richard Wagner et son œuvre poétique, 1882.djvu/45

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
31
richard wagner

put changer son cœur. On s’en vengea en inventant sur lui diverses légendes plus ou moins absurdes dont il doit peu se soucier. Sa seule et impardonnable bizarrerie est d’être profondément intelligent et de préférer l’intimité des chefs-d’œuvre aux frivoles et banals plaisirs du monde.

Durant quinze jours, je passai après-midi et soirées dans cette charmante retraite de Tribschen ; — car j’eus l’honneur d’être bientôt considérée comme une amie. Quand les esprits sont d’accord, les cœurs s’entendent bien vite, et mon affection pour mes hôtes égala bientôt l’admiration que m’avait inspirée l’artiste.

Il n’y avait de vrai dans tous les renseignements que l’on m’avait donnés sur la vie intime de Wagner, que le grand chien noir. Rus était un beau Terre-Neuve, très doux, très pacifique, qui venait souvent me voir, tout seul, à l’hôtel du Lac.

Peu de visiteurs franchissaient le seuil de la maison du maître ; il ne connaissait per-