Page:Gautier - Spirite (Charpentier 1886).djvu/206

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

s’appuyassent que sur la rapide vision du bois de Boulogne, elle pressentait quelque amour caché derrière ce soin excessif de sa réputation. Pourtant rien n’était changé dans la vie apparente de Guy, et Jack, secrètement interrogé par la femme de chambre de Mme d’Ymbercourt, assura qu’il n’avait pas entendu depuis bien longtemps le moindre frou-frou de soie sur l’escalier dérobé de son maître, qui sortait peu, ne voyait guère que le baron de Féroë, vivait en cénobite et passait une grande partie de ses nuits à écrire.

D’Aversac redoublait d’assiduités et Mme d’Ymbercourt les acceptait avec cette tacite reconnaissance d’une femme un peu délaissée qui a besoin d’être rassurée sur ses charmes par de nouvelles adorations. Elle n’aimait pas M. d’Aversac, mais elle lui savait gré de priser si haut ce que Guy semblait dédaigner ; aussi, le mardi, à une représentation de la Traviata, fit-on la remarque que la place de Malivert était occupée par d’Aversac, ganté et cravaté de blanc, un camélia à la boutonnière, frisé et pommadé comme un homme à bonnes fortunes qui a des cheveux et tout rayonnant de fatuité heureuse. Depuis longtemps il nourrissait cette ambition de plaire à Mme d’Ymbercourt, mais la préférence marquée accordée à Guy de Malivert l’avait rejeté sur le troisième ou quatrième plan, parmi les adorateurs vagues qui