Page:Gautier - Spirite (Charpentier 1886).djvu/37

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gelé, » disait de lui la belle duchesse de C…, qui, s’il fallait en croire les médisances, avait essayé de fondre cette glace.

Comme Malivert, le baron de Féroë regardait un dos charmant d’une blancheur neigeuse se présentant dans une attitude un peu courbée qui en arrondissait délicieusement les lignes et qu’une traîne de feuillage glauque, détachée de la coiffure faisait parfois frissonner par un imperceptible chatouillement.

« Charmante personne ! dit le baron de Féroë à Guy, dont il avait suivi le regard ; quel dommage qu’elle n’ait pas d’âme ! Celui qui en deviendrait amoureux éprouverait le sort de l’étudiant Nathaniel dans l’Homme au sable d’Hoffmann ; il courrait risque de serrer au bal un mannequin entre ses bras, et c’est une valse macabre que celle-là pour un homme de cœur.

— Rassurez-vous, cher baron, répondit en riant Guy de Malivert, je n’ai aucune envie de m’éprendre de l’être à qui appartiennent ces belles épaules, quoique de belles épaules ne soient pas en elles-mêmes un objet à dédaigner. En ce moment, je l’avoue à ma honte, je n’éprouve pas l’ombre de passion pour qui que ce soit.

— Quoi, pas même pour Mme d’Ymbercourt que vous allez, dit-on, épouser ? répliqua le baron de Féroë avec un air d’incrédulité ironique.

— Il y a de par le monde, dit Malivert, en se