Page:Gautier - Tableaux à la plume, Fasquelle, 1880.djvu/165

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Le tableau du maître était donc bien malade, qu’il a eu besoin, il y a déjà plus de cent ans, d’une médication si violente ? Nullement, il se porte admirablement bien encore aujourd’hui ; et, pour qu’il montre toute la fraîcheur de la santé, il suffit qu’on le débarrasse de ses cataplasmes et de ses emplâtres qui recouvrent des chairs parfaitement saines. Figurez-vous que, pour boucher une fissure, grande comme la craquelure d’une faïence à poêle, on a fait baver sur les lèvres de l’imperceptible cicatrice un horrible magma dont le ton fangeux obligeait, par le contraste, à repeindre tout le morceau, souvent une tête entière, une épaule, un bras, avec une palette et un pinceau de vitrier ! Heureusement, comme nous l’avons déjà dit, la peinture des maîtres a la dureté du ciment, de l’émail, de la mosaïque. Il suffit d’éponger la poussière des siècles et la bêtise des hommes pour qu’elle reprenne son lustre primitif.

La restauration nouvelle consiste à mettre le tableau du grand peintre espagnol à nu et à remplir strictement, avec un ton pareil, les trous, fort peu nombreux, du reste, produits par la chute de quelque écaille. La plus grande sobriété est apportée à ces travaux, et, dans quelques jours, les visiteurs du Musée connaîtront un Murillo non moins inédit que le Rubens de la galerie Médicis.

Nous avons insisté longtemps sur ces détails fasti-