Page:Gautier - Tableaux de Siége.djvu/28

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

croix de gueules sur champ d’argent. Le palais est changé en ambulance, et dans le jardin les statues de Coysevox, de Coustou, de Lepautre et de Théodon regardent avec surprise, de leurs grands yeux blancs, les parcs d’artillerie, les canons, dogues de bronze qui ne demandent qu’à aboyer, les tentes sous lesquelles se glisse le soldat, et tout cet appareil de guerre qu’il semblait que Paris ne dût jamais voir. Paris, n’était-ce pas la ville neutre par excellence, la vraie capitale du monde, le cerveau et l’œil de l’Univers ? Au-dessus des arbres tournoient les pigeons inquiets, et les moineaux se demandent en leur langage qu’est devenu le charmeur. Cependant, impassibles comme des sentinelles de marbre et de bronze, les sphinx de Sébastopol et les lions de Barye continuent à monter leur faction.

Quelle admirable bassin forme la Seine entre le pont royal et le pont de la Concorde ! à droite, au-dessus du quai, la terrasse des Tuileries avec son garde-fou à pilastres et son couronnement de grands arbres où l’automne mêle à la verdure des teintes de safran ; à gauche, le palais d’Orsay, le charmant palazzino de la Légion d’honneur, l’hôtel de l’am-