Page:Gautier - Tableaux de Siége.djvu/58

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c’est un rempart fait de poitrines d’hommes : voyez plutôt Sparte, qui n’avait pas de murailles. Mais Athènes, non moins brave, en avait ! et les fortifications tant raillées autrefois nous sauvent aujourd’hui.

On ne peut guère demander à l’art de la défense moderne, n’employant que des lignes droites, des angles sortants et rentrants, enfouissant autant que possible ses constructions au ras de terre, l’aspect pittoresque des forteresses du moyen âge avec leurs tours rondes ou carrées, leur moucharabys, leurs donjons élevés, leurs échauguettes, leurs tourelles en poivrière et leurs toits en éteignoir, défenses formidables à l’œil, excellentes contre des flèches, des mangonneaux et des balistes, mais qui ne sauraient résister à de l’artillerie. Pourtant une beauté sévère se dégage de ces lignes mathématiques. Leur logique rigoureuse plaît à l’œil en dehors de toutes les séductions de la forme. On sent qu’il n’y a rien là qui ne soit nécessaire, et la configuration absolue de l’utile a fatalement son charme. Nous regardions, non sans plaisir, ce dessin ferme et net de la crête du rempart se détachant en vigueur sur la blancheur lumineuse