Page:Gautier - Tableaux de Siége.djvu/62

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ferme et grave, indiquant la résolution sérieuse de faire leur devoir à l’heure du péril. Plus de ces chants, de ces cris et de cette ivresse des premiers jours. La foule devient une armée, cela est sensible au premier coup d’œil.

Comme pour ramener la rêverie du promeneur à la situation, une fumée sortait de temps en temps du fort d’Ivry, déroulait ses flocons sur le ciel, et la voix du canon arrivait profonde et basse dans une bouffée de vent. C’est quelque obus qu’on envoie sonder une cachette de Prussiens.

Jusqu’à présent, nous n’avons décrit que le rempart. Regardons maintenant de l’autre côté de la rue militaire, qui n’est pas moins curieux. Les murs des maisons, les clôtures des jardins que surmontent des branches d’arbres effeuillées et jaunies par l’automne sont bariolés d’immenses affiches imprimées ou obtenues au moyen d’estampages. Des abris recouverts de toile cirée ou goudronnée offrent en cas d’averse un refuge aux gardes nationaux. Sur de vastes tentes de toile grise on lit : Cantine administrative. Çà et là sont établis des marchands de comestibles et de boissons. Une cantinière de fantaisie, coquettement