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PROLOGUE


POUR LE FALSTAFF DE MM. P. MEURICE ET A. VACQUERIE


Récité par M. Louis Monrose sur le théâtre de l’Odéon le 2 octobre 1842.




Beau sexe, sexe laid, jeunesse, et vous vieillesse,
Ne sifflez pas encor, je ne suis pas la pièce ;
Gardez, pour en cribler les endroits incongrus,
Votre provision d’œufs durs et de fruits crus :
Sous cet accoutrement de satin blanc et rose,
Tel que vous me voyez, je suis Louis Monrose,
Pour le présent prologue ; une position
À ne pas exciter la moindre ambition !
Tout à l’heure, changeant de costume et de rôle,
Je représenterai John Falstaff, un fier drôle !
Hes compagnons sont là, derrière le rideau,
Un tas de chenapans qui n’ont jamais bu d’eau.
Tout prêts, tout habillés, fardés jusqu’aux oreilles,
Mais pâlissant de peur, sous leurs teintes vermeiles ;
Car chacun sait que l’autre est un affreux gredin
Que l’on a négligé de pendre par dédain :
Tous les vices en fleur bourgeonnent sur leurs trognes ;
Ils sont un peu filous, énormément ivrognes,
Très-poltrons, très-hâbleurs, à cela près charmants.
Mais que vous semblera de pareils garnements,
Hommes de ces temps-ci, vous, spectateurs honnêtes,
Qui rentrez de bonne heure et qui payez vos dettes ?