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dit-il, c’est le cercle de danse des Wilis ! » Il leur montre la tombe de Giselle… de Giselle qui dansait toujours. Il la désigne par la couronne de pampres qu’on lui mit sur le front pendant la fête, et qui est appendue à la croix de marbre.

A cet instant, on entend sonner minuit dans le lointain : c’est l’heure lugubre où, selon la chronique du pays, les Wilis se rendent à leur salle de bal.

Hilarion et ses compagnons écoutent l’horloge avec terreur ; ils regardent en tremblant autour d’eux, s’attendant à l’apparition des légers fantômes. « Fuyons, dit Hilarion, les Wilis sont impitoyables ; elles s’emparent des voyageurs et les font danser avec elles jusqu’à ce qu’ils meurent de fatigue ou soient engloutis dans le lac que vous voyez d’ici. »

Une musique fantastique commence alors ; les gardes-chasse pâlissent, chancellent et s’enfuient de tous côtés, avec les signes du plus grand effroi, poursuivis par des feux follets qui apparaissent de toutes parts.

SCÈNE III

Une gerbe de jonc marin s’entr’ouvre alors lentement, et du sein de l’humide feuillage on voit s’élancer la légère Myrtha, ombre transparente et pâle, la reine des Wilis. Elle apporte avec elle un jour mystérieux qui éclaire subitement la forêt, en perçant les ombres de la nuit. Il en est ainsi toutes les fois que les Wilis paraissent. Sur les blanches épaules de Myrtha, palpitent et frémissent des ailes diaphanes dans lesquelles la Wili peut s’envelopper comme avec un voile de gaz.

Cette apparition insaisissable ne peut rester en place, et s’élançant tantôt sur une touffe de fleurs, tantôt sur une branche de saule, voltige çà et là, parcourant et semblant