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SCÈNE VI

La vision enfuie, Achmet se rendort. Roucem entre et le réveille. Le jeune homme, tout ému encore de l’apparition de la Péri, raconte à l’eunuque qu’il vient d’être visité par un être surnaturel, d’une beauté idéale, et qui répond à son amour. — Elle était là tout à l’heure, j’en suis sûr ! — Visions ! chimères ! dit Roucem. La fée est sortie de la fumée de votre pipe ; c’est l’effet de l’opium qui produit des extases. La Péri n’existe que dans votre imagination, mon cher maître ; ne pensez plus à cela, revenez à la raison, au vrai, au réel, qui a bien son prix. Vous possédez de belles esclaves, payées en bons et loyaux sequins d’or, une sultane favorite charmante ; aimez-la et ne cherchez pas à devenir l’amant d’une Péri. Ces sortes d’aventures finissent toujours mal.

SCÈNE VII

Achmet, à demi convaincu par Roucem, et doutant déjà de la vision, qu’il met sur le compte de l’opium, commande qu’on fasse revenir les femmes. Nourmahal, employant toutes les ressources de la coquetterie, réveille dans le cœur d’Achmet l’ancienne passion qu’il avait pour elle. Achmet, reconquis à la réalité, va pour jeter le mouchoir à Nourmahal ; mais la Péri qui, dès le commencement de cette scène, a reparu invisible pour tous, saisit le mouchoir, le jette à terre, le foule aux pieds, et remet dans les mains d’Achmet le bouquet mystérieux, preuve de la vérité de son rêve. Tous les souvenirs d’Achmet se réveillent avec force ; il porte l’étoile à sa bouche, et la