Page:Gautier - Théâtre, Charpentier, 1882.djvu/337

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— Oui, et il m’a donné cette croix d’or en me chargeant de la remettre à sa fiancée, puis il s’est noyé sans qu’il me fût possible de lui porter secours, car je ne sais pas nager.

Cette nouvelle désole Job, qui se voit définitivement constitué soldat par le trépas de son remplaçant ; mais elle ne désole pas assez Pâquerette, dont la feinte douleur n’a pas cette expression naïve qui persuade.

Bridoux, aussi fort sur le cœur humain que sur la théorie, remarque que la mimique de Pâquerette n’est pas aussi désespérée qu’il conviendrait ; et un signe d’intelligence, qu’il surprend entre la jeune fille et le vielleur, ne lui laisse plus de doute.

Il se rapproche lentement de François, qu’il examine avec attention, et marchant droit à lui, il fait tomber son chapeau et lui arrache sa fausse barbe. François est découvert.

« Je te tiens, mon gaillard, s’écrie Bridoux ; tu m’as assez fait trimer. À moi, soldats ! »

Les militaires se rangent autour de leur chef. François, se voyant pris, tire de sa poche une tabatière et en lance le contenu aux yeux de ceux qui veulent l’arrêter. Pendant qu’aveuglés par l’acre poussière, ils se frottent les paupières, et marchent en se heurtant les uns les autres d’une façon comique, François, suivi de Pâquerette, a disparu et gagné la forêt voisine, où les cavaliers ne pourront le suivre.

Dernier tableau

Une division de l’armée française occupe Ujhaz, en Hongrie, pendant la guerre du Palatinat. C’est dans cette ville que François s’est réfugié ; il y a acquis une petite fortune en exerçant, avec succès, sa profession de menuisier. — Pâquerette, qu’il a épousée, est bouquetière.