Page:Gautier - Un trio de romans, Charpentier, 1888.djvu/363

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ou dans une chaise hermétiquement close qui vous jette à la porte, ouverte et fermée aussitôt, sans que le passant curieux ait pu saisir autre chose que la pointe d’une mule de satin et le bout des doigts gantés soulevant le marteau ou tirant le pied de la sonnette.

Comme Rosette n’avait rien à ménager, ni frère féroce, ni mari jaloux, ni protecteur en titre, elle ne risquait rien à se montrer à découvert, et s’en alla heurter bravement à la porte de la petite maison.

Un valet, couvert d’une livrée de fantaisie, et qui habitait là au cas qu’un rendez-vous de jour ou de nuit y amenât M. le vicomte, ouvrit aussitôt et introduisit Rosette dans le sanctuaire.

Ce vénérable portier de Cythère avait l’air grave, empesé, discret et pénétré de l’importance de sa place, qui n’était pas une sinécure, car jusqu’alors le vicomte avait mené joyeuse vie.

Il ne parut nullement étonné de la présence de Rosette, quoiqu’il ne l’attendît pas ; mais M. de Candale avait auprès des belles des façons si persuasives et si triomphantes, que le temps lui manquait souvent pour prévenir les ministres de ses voluptés ; celui-ci pensa donc que c’était un rendez-vous impromptu, et que le vicomte allait arriver.

Cette petite maison, que rien ne décelait du dehors, et qui se cachait derrière de grands murs insignifiants, vieillis à dessein pour ne pas attirer l’œil, était une des plus élégantes du faubourg : tout y était disposé pour le plaisir et le mystère.

Quatre ou cinq pièces plafonnées en coupole et prenant le jour de haut, la composaient. Tout ce que le luxe peut inventer de rare et de voluptueux y était réuni.

Les mythologies amoureuses dues au pinceau agréable et léger de Boucher, le peintre des Grâces et des