vement est d’une activité sans pareille. Une foule bigarrée, où chaque pays du monde a ses représentants, se presse à toute heure au pied des colonnes surmontées de statues qui décorent le quai. Depuis la peau blanche et les cheveux roux de l’Anglais jusqu’au cuir bronzé et à la laine noire de l’Africain, en passant par les nuances intermédiaires café, cuivre et jaune d’or, toutes les variétés de l’espèce humaine se trouvent rassemblées là. Dans la rade, un peu au loin, se prélassent les trois-mâts, les frégates, les bricks, hissant chaque matin, au son du tambour, le pavillon de leur nation respective ; les navires marchands, les bateaux à vapeur, dont les cheminées éructent de la vapeur bicolore, s’approchent davantage du bord à cause de leur plus faible tonnage et forment les premiers plans de ce grand tableau naval.
J’avais une lettre, de recommandation pour le commandant du brick français Le Voltigeur, en station dans la rade de Cadix. Sur sa présentation, M. Lebarbier de Tinan m’avait gracieusement invité à dîner, ainsi que deux autres jeunes gens, à son bord, pour le lendemain, vers cinq heures. À quatre heures, nous étions sur le môle, cherchant une barque et un patron pour faire le trajet du quai au navire, quinze ou vingt minutes tout au plus. Je fus très-étonné lorsque le patron nous demanda un douro au lieu d’une piécette, prix ordinaire de la course. Dans mon ignorance nautique, voyant le ciel parfaitement clair, un soleil étincelant comme au premier jour du monde, je m’étais innocemment figuré qu’il faisait beau temps. Telle était ma conviction. Il faisait au contraire un temps atroce, et je ne tardai pas à m’en apercevoir aux premières bordées que courut le canot. La mer était courte, clapoteuse, et d’une dureté effroyable. Il ventait à décorner les bœufs. Nous sautions comme dans une coquille de noix, et nous embarquions de l’eau à chaque instant. Au bout de quelques minutes, nous jouissions d’un bain de pieds qui menaçait fort de se changer bientôt en bain de siège. L’écume