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sent ; mais il y a des gens qui ne sont jamais contents de rien, et qui regrettent, comme ce roi d’Espagne, de ne pas s’être trouvés là lorsque Dieu fit le monde, parce qu’ils lui auraient donné de bons conseils. Ces gens-là, à force de recherches, de combinaisons et d’efforts, sont parvenus à fabriquer un animal de fer, de cuivre et d’acier, qui boit de l’eau bouillante et mange du feu, a des roues au lieu de jambes, et ne peut marcher que sur des tringles. Cette bête monstrueuse, qui grogne, qui glapit, éructe et produit toute sorte de bruits singuliers, traîne des fardeaux énormes plus vite que le vent !… Le vent ! qu’ai-je dit là ? quelle comparaison antique et surannée ! le vent reste bien en arrière de la vapeur. — Cette bête ne se fatigue pas, bien qu’elle se couvre de sueur ; toutefois, elle a cela de commun avec l’ex-cheval, qu’elle prend le mors aux dents si on la surmène, éclate comme un obus, et fait payer bien cher sa vélocité. — Dans l’esprit du peuple, une locomotive passe pour un être doué de vie, et j’avoue que je suis un peu de