Page:Gauvreau - Au bord du Saint-Laurent, 1923.djvu/23

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Miramichi et Saint-Jean. De nos jours les restes de ces tribus si intéressantes à plus d’un titre, sont épars un peu partout ; le village de Ristigouche a gardé ses Micmacs, plus ou moins purs de tout alliage, et les Maléchites, après avoir déserté leur réserve de l’Isle-Verte et de Saint-Épiphane, dans Témiscouata, font maintenant leurs délices de vivre aux rivages de Cacouna et de la Rivière-du-Loup. C’est là qu’on les trouve faisant le commerce de paniers et de raquettes, la chasse aux loups-marins, ou servant de guides aux chasseurs étrangers qui veulent « enfoncer dans les forêts de Témiscouata et de Rimouski.

Sur quoi, me demanderez-vous, repose cette légende de l’Îlet au Massacre ? Elle repose assurément sur un fond historique que nous pouvons constater au récit du second voyage de Jacques-Cartier, dans lequel nous lisons le passage suivant :

« — Et fut par le dit Donnacona, montré au dit capitaine, les peaux de cinq têtes d’hommes étendues sur des bois, comme peaux de parchemins ; et nous dit que c’étaient des Toudamens (Iroquois) de devers le Sud qui leur menaient continuellement la guerre. Outre nous fut dit, qu’il y a deux ans passés que les dits Toudamens les vinrent assaillir jusque dedans le dit fleuve à une Île qui est le travers du Saguenay où ils étaient à passer la nuit, tendans aller à Honguedo (Gaspésie) leur mener la guerre avec environ deux cents personnes, tant hommes, femmes, qu’enfants, lesquels furent surpris en dormant dedans un fort qu’ils avaient fait, où mirent les dits Toudamens le feu tout à l’entour et comme ils sortaient, les tuèrent tous, réserve cinq qui échappèrent. De laquelle détrouse se plaignaient encore fort, nous montrent qu’ils en auraient vengeances. »

Assurément il y a des obscurités dans ce simple récit ; il y a des confusions qui ne peuvent pas nous étonner étant données les circonstances dans lesquelles se trouvaient et narrateur et les conteurs ; cependant, avec la tradition, qui s’est perpétuée comme une chaîne ininterrompue parmi les tribus sauvages d’en bas de Québec, il est facile de jeter un peu de lumière sur ce sujet que M. J. C. Taché a développé avec un talent merveilleux et dont les écrits m’ont été si utiles dans la préparation de cet humble travail.