Page:Gauvreau - Captive et bourreau, paru dans La Gazette des Campagnes, 1883.pdf/23

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Comment cela, père ?

— Vous serez heureuse, on ne peut plus ; mais comme tout a son revers, vous aurez aussi de grands malheurs.

— Mais enfin quel sera le terme, quelle sera la fin de cette vie heureuse et malheureuse que vous me prédisez, certainement pas à la manière des prophètes ? sera-t-elle triste ou joyeuse la fin de cette vie ?

— L’une ou l’autre, répondit le vieillard, avec un imperturbable sang froid.

— Ah ! ah ! ah ! ah ! se prit à rire Alexandrine. Ce n’est pas difficile un horoscope de ce genre. Je puis vous en prédire autant, père.

— Ne riez pas, mamzelle. Les paroles d’un vieillard ont du poids.

Pas dans ce qui touche l’avenir, à moins que vous ne commerciez avec le malin, comme disent les gens.

— Vous saurez me le dire, mamzelle, si le bon Dieu ne me fait pas faire le saut avant que je vous revoie.

— Voyons ! n’allez pas me jeter un sort. Il ne manquerait plus que cela à présent.

— Soyez sans crainte, mamzelle. Je suis trop chrétien pour cela. Il ne sera jamais dit que le père Harnigon a jeté des sorts au monde. Oh ! bigre, plutôt être pendu par le bout du nez. Et puis, voyez-vous, ce serait me montrer ingrat envers vous, vous qui m’avez donné à couvert. Ouf ! mes pauvres jambes, si vous saviez comme ça s’est tout usé. Oh ! je vois