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Page:Gavarni - Grandville - Le Diable à Paris, tome 2.djvu/143

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pas pourquoi, vous, Adolphe, si fièrement posé dans votre cravate ! vous qui tendez votre torse en homme satisfait.

Quelques jours après, la couturière arrive, elle essaye une robe, elle rassemble ses forces, elle ne parvient pas à l’agrafer… On appelle la femme de chambre. Après un tirage de la force de deux chevaux, un vrai treizième travail d’Hercule, il se déclare un hiatus de deux pouces. L’inexorable couturière ne peut cacher à Caroline que sa taille a changé. Caroline, l’aérienne Caroline menace d’être pareille à Mme Deschars. En termes vulgaires, elle épaissit.

On laisse Caroline atterrée.

« Comment ! avoir, comme cette grosse Mme Deschars, des cascades de chair à la Rubens ? Et c’est vrai, se dit-elle… Adolphe est un profond scélérat. Je le vois, il veut faire de moi une mère Gigogne ! et m’ôter mes moyens de séduction ! »

Caroline veut bien désormais aller aux Italiens, elle y accepte un tiers de loge, mais elle trouve très-distingué de peu manger, et refuse les parties fines de son mari :

« Mon ami, dit-elle, une femme comme il faut ne saurait aller là souvent… On entre une fois, par plaisanterie, dans ces boutiques ; mais s’y montrer habituellement ?… fi donc ! »

Borel et Yéry, ces illustrations du fourneau, perdent chaque jour mille francs de recette à ne pas avoir une entrée spéciale pour les voitures. Si une voiture pouvait se glisser sous une porte cochère, et sortir par une autre en jetant une femme au péristyle d’un escalier élégant, combien de clientes leur amèneraient de bons, gros, riches clients !…

Axiome.

La coquetterie tue la gourmandise.

Caroline en a bientôt assez du théâtre, et le diable seul peut savoir la cause de ce dégoût. Excusez Adolphe : un mari n’est pas le diable.

Un bon tiers des Parisiennes s’ennuie au spectacle, à part quelques escapades, comme : aller rire et mordre au fruit d’une indécence, — aller respirer le poivre long d’un gros mélodrame, — s’ex-