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Page:Gavarni - Grandville - Le Diable à Paris, tome 3.djvu/34

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le maitre. — Il me semble que vous pourriez me les donner d’abord.

augustine, avec dédain. — Oh ! mon Dieu ! les voilà, vos journaux. Ils ne sont pas déjà si intéressants. Depuis trois jours nous sommes sans feuilletons…..

le maitre. — Mon café, Augustine.

augustine. — Il n’est pas fait. Voilà tout.

le maitre. — À dix heures !

augustine. — Vous oubliez que nous sommes en hiver et qu’il n’est jamais jour.

le maitre. — Il faut pourtant que je sorte.

augustine. — Si vous preniez votre café à votre second déjeuner.

le maitre. — Je ne déjeunerai pas ici.

augustine. — Deux soucis de moins pour moi, en ce cas. Et où allez-vous déjeuner ?

le maitre. — Chez un ami.

augustine. — …e.

le maitre. — Chez un ami, vous dis-je.

augustine, appuyant sur la voyelle. — …e.

le maitre. — …e ! e ! e ! e !… Voyons que je m’habille.

augustine, s’asseyant dans un fauteuil. — Ne vous fâchez pas.

le maitre. — Mes bottes !

augustine, croisant les jambes. — Vos bottes ne sont pas prêtes.

le maitre. — Et pourquoi ?

augustine, fièrement. — Je vous ai dit que je ne voulais plus les vernir. Cette besogne-là n’est pas d’une femme.

le maitre. — Vous n’avez plus voulu frotter mon appartement, parce que ce n’était pas, disiez-vous, la besogne d’une femme ; vous n’avez plus voulu ensuite battre mes habits, parce que ce n’était pas, avez-vous dit encore, la besogne d’une femme ; vous n’avez plus voulu faire mes commissions, toujours parce que ce n’était pas la besogne d’une femme ; aujourd’hui, vous refusez de vernir mes bottes, parce que ce n’est pas la besogne d’une femme. Mais quelle est donc, je vous prie, la besogne d’une domestique ?

augustine, décroisant les jambes. — Comme cela vous coûte peu à dire ! votre domestique !  ! Eh bien, votre domestique vous demande son congé.

le maitre, très-agité. — Soit ! Je suis las de ce despotisme !

augustine, quittant le fauteuil. — Despo… quoi ?

le maitre, jetant son bonnet de nuit. — …tisme