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Page:Gazette des Campagnes, 1861-09-21.djvu/3

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GAZETTE DES CAMPAGNES.

Sinon, heureux toujours d’avoir été sincères et dévoués, nous n’abandonnerions une œuvre si utile qu’autant que nous verrions qu’elle aura été abandonnée avant nous par le public. C’est un tort déjà connu parmi nous, celui-là. Puisse-t-il ne pas se réaliser dans l’œuvre actuelle !

Aux enseignements agricoles, il sera joint d’autres connaissances utiles, propres à la vie des campagnes ; ainsi qu’une revue de la quinzaine, résumant les événements publics en autant qu’ils peuvent intéresser le cultivateur et sa vertueuse famille.

Nous ferons suivre cette Histoire de la Quinzaine par une chronique des travaux des champs ; ensuite viendront les Correspondances que nous adresseront nos Collaborateurs ou les Abonnés. Nous nous garderons bien d’oublier les Variétés et de temps à autre le petit mot pour rire. Le reste de l’espace sera consacré à une Revue des marchés et à un Rapport sur l’état de la Température dans les diverses parties du pays.

Voilà donc notre route tracée. La tâche est difficile et peut-être audessus de nos forces. Aussi, ce n’est qu’en travaillant avec courage, en étudiant sérieusement avec nos lecteurs que nous pourrons réussir à l’accomplir jusqu’au bout, sans broncher. — Nous comptons en conséquence sur la bienveillance et le concours actif des abonnés. Qu’ils se persuadent que nous ferons tous nos efforts pour leur indiquer la meilleure voie à suivre. Nous pourrons commettre des erreurs, mais nous serons heureux de les rectifier lorsque l’on voudra bien nous les signaler ; car les sots seuls ont la prétention de ne jamais se tromper. Nous avons entrepris une œuvre d’utilité et non d’amour propre, c’est dire que nous ne redoutons ni les contradictions ni la rectification de nos erreurs.

Nous faisons appel à tous les hommes sincèrement dévoués au progrès agricole. Qu’ils nous fassent part des succès obtenus, qu’ils nous initient à leur savoir et aux méthodes qu’ils pratiquent. C’est ainsi que nous formerons ensemble un corps de doctrines utiles à tous et propre à diriger les cultivateurs dans la voie difficile de l’application.

Pour nous, les efforts et la bonne volonté ne feront jamais défaut et nous serons heureux si nous avons contribué pour la plus légère part au progrès de notre agriculture et de notre colonisation qui sont les deux ancres de salut de la nationalité canadienne-française.


Histoire de la 1ère quinzaine de septembre.


Peu d’événements remarquables se sont passés depuis le commencement de ce mois.

Au dehors, chez nos voisins et sur toute la surface de l’Europe, la tempête grossit toujours. La guerre menace partout ; on s’arme jusqu’aux dents. Les armées mêmes sont en présence, entre le Nord et le Sud, chez nos voisins ; et toutefois, on semble ignorer pourquoi on veut se battre. En Europe, la question est encore plus incertaine. Et pourquoi cette incertitude ? Autrefois on connaissait ses ennemis, on savait quand il fallait armer et pourquoi on se battait. On ne troublait pas le monde par le bruit des armes et l’horreur du sang sans en avoir médité sérieusement la cause. On pouvait se tromper sur la valeur morale de cette cause, mais toujours on n’entreprenait rien sans consulter l’honneur et la justice. Aujourd’hui, faute de principes et d’honneur, tout le monde a peur et veut la guerre. L’Europe nous semble jouer d’abord une immense comédie, où le faux a continuellement l’air de la vérité, mais tout le monde est du secret, et tout le monde sait, au fond, que c’est la vérité qui est jouée et que le beau rôle reste au mensonge. De là, point de confiance nulle part. De là, les armes et l’inquiétude. De là la tempête européenne bientôt déchaînée tout-à-fait, et maîtresse pour quelque temps.

Et d’où vient ce tumulte. Dans tous les pays catholiques, la vraie raison de ce désordre universel, ne saurait être ignorée de personne, à la campagne comme ailleurs. Le monde n’est pas fait pour la peur, pour l’incertitude, pour la guerre continuelle. Ce sont des maux, à la vérité très-naturels aux sociétés humaines, à cause de leurs passions et des crimes qui en sont la suite : crimes qui appellent sur ces sociétés le châtiment et la correction. Mais à l’état où ces maux sont arrivés aujourd’hui, ils sortent évidemment de l’état ordinaire et naturel, pour devenir un sujet d’appréhension et d’effroi bien légitimes ; attendu que la mesure de l’iniquité parait comble et que Dieu va frapper un grand coup sur les sociétés coupables.

Toute autre interprétation de ce qui se passe aujourd’hui dans le monde civilisé, ou de ce qui s’y prépare est un leurre ou un mécompte. Consultez dans le catholicisme et non dans les rangs de l’impiété, de l’hérésie ou de l’indifférentisme, les esprits les plus doctes et les plus sérieux ; entendez la voix des évêques et du pontife suprême qui siège à Rome et en qui la vérité a, ici-bas, sa plus haute garantie ; tous vous diront que nos temps sont une révolte, une apostasie universelle dirigée contre Dieu et son Christ.

La gangrène a tout gagné, peuples et rois.

Le vertige est partout. L’idée morale, nulle part. La semence pendant trop de temps, des mauvais principes, a partout étouffé le bon. Rien d’étonnant si la terre, aujourd’hui, maudite de nouveau, en quelque sorte, ne pousse plus que des ronces et des épines dans le champ moral des consciences et des esprits.

Cependant, chose incompréhensible, on veut toujours l’ordre, la paix, le respect des droits et l’accomplissement des devoirs. Mais que fait-on ? On sait que toutes ces choses avaient, autrefois, leur raison d’être et leur sanction dans la religion, dans le Christianisme complet, le catholicisme. Mais ayant prévariqué tant et si longtemps à son égard, par un châtiment providentiel et bien légitime, on a perdu à moitié sa lumière et sa force ; et l’on s’est pris à faire soi-même une nouvelle lumière et une autre force pour se conserver l’ordre, la paix, les droits et les devoirs. Les uns pour en venir là, ont mis leur confiance dans les canons rayés, dans l’artifice, dans le droit nouveau. Les autres, dans les flottes, la diplomatie, dans l’influence du schisme ou de l’hérésie. Ceux ci ont eu recours aux concessions venues trop tard et mal présentées.

Les peuples européens, accoutumés qu’on les a faits à une politique indépendante des principes de la