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peut-être pas nos contemporains, et ces réponses manuscrites, venues de tous les points de la France, offrent en général un très-grand intérêt[1].

Voici quelques fragments de réponses relatifs aux questions posées par Grégoire en 1790, et par M. Taine quatre-vingt-dix ans plus tard. Vos lecteurs pourront voir ainsi, monsieur le directeur, quel était l’état des esprits en France aux plus mauvais jours de l’anarchie spontanée.

« On peut, dit M. Taine, compter plus de trois cents émeutes dans les quatre mois qui précèdent la prise de la Bastille. Il y en a de mois en mois, et de semaine en semaine en Poitou, Bretagne, Touraine, Orléanais, Normandie, Île-de-France , Picardie, Champagne, Alsace, Bourgogne, Nivernais, Auvergne, Languedoc, Provence. » Suivons autant que possible le même ordre, et voyons ce qu’écrivaient en 1790 les divers correspondants de Grégoire,

« — Poitou. On ne peut rien dire de certain sur les effets moraux qu’a produits la Révolution sur l’esprit des Poitevins. Les affections qu’inspire l’intérêt personnel les rendent tantôt patriotes et tantôt aristocrates. Ce que je puis dire avec consolation, c’est que le département de la Vienne n’a commis aucun meurtre ni incendie, etc. Les aristocrates courent sans cesse comme des fous pour alarmer les laboureurs et ouvriers, etc.[2] »

« — Ils sont plus éclairés, écrivait un autre correspondant, surtout ceux qui habitent le long et le voisinage des grandes routes. Ils sont plus débauchés, leurs mœurs

  1. Elles ont paru en volume sous ce titre : Lettres à Grégoire sur les patois de France ; elles avaient été au préalable publiées à Montpellier dans la Revue des langues romanes.
  2. Lettre du 8 novembre 1790, envoyée par Pressac, curé de Civray, de la Société royale d’agriculture.