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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/144

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fuite dans les forêts avec un gouverneur, donnoient à entendre qu’il étoit le fils d’un souverain détrôné… Je croyois et je voulois croire ce roman d’un si grand genre, en sorte que les plaisanteries de ma mère me scandalisèrent beaucoup. Depuis ce jour M. de Saint-Germain ne dit rien de remarquable dans ce genre ; je ne l’entendis parler que de musique, des arts, et des choses curieuses qu’il avoit vues dans ses voyages. Il me donnoit sans cesse des bonbons excellens, en forme de fruits, qu’il m’assuroit avoir faits lui-même ; de tous ses talens ce n’étoit pas celui que j’estimois le moins. Il me donna aussi une boîte à bonbons très-singulière, dont il avoit fait le dessus. La boîte, d’écaille noire, étoit fort grande ; le dessus en étoit orné d’une agate de composition beaucoup moins grande que le couvercle ; on posoit cette boîte devant le feu, et au bout d’un instant, en la reprenant, on ne voyoit plus l’agate, et l’on trouvoit à sa place une jolie miniature représentant une bergère tenant une corbeille remplie de fleurs ; cette figure restoit jusqu’à ce qu’on fit réchauffer la boîte, alors l’agate reparoissoit et cachoit la figure. Ce seroit une jolie manière de cacher un portrait.