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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/148

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avec eux ; ils y consentirent à condition qu’il subiroit l’opération du tatouage, c’est-à-dire, qu’il se laisseroit peindre tout le corps à leur manière, avec des sucs d’herbes, opération très-douloureuse qu’il supporta avec un courage qui charma les sauvages. Il avoit une mémoire prodigieuse, la santé la plus robuste ; bientôt il apprit leur langue, et il excella dans tous leurs exercices. Pour ne point oublier ce qu’il savoit (il avoit fait pour son âge d’excellentes études et remporté tous les prix de ses classes), il traçoit tous les jours sur des écorces d’arbres, des passages de poésie latine et françoise et des figures de géométrie. Il se fit de ses écorces un recueil prodigieux qu’il conserva avec le plus grand soin ; il acquit parmi les sauvages la plus haute considération, et avant l’âge de vingt ans il devint leur chef par une proclamation unanime. Les sauvages déclarèrent la guerre aux Espagnols. Mon oncle apprit aux sauvages à la faire avec plus d’intelligence, il remporta, en les commandant, des avantages qui surprirent les Espagnols, qui trouvèrent que le jeune chef des sauvages avoit des talens extraordinaires. Ils parlèrent de paix, mon oncle fut envoyé pour la négocier ; et il