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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/271

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je ne la nourris point, ce n’étoit point la mode encore ; d’ailleurs, dans notre situation je ne l’aurois pas pu, étant obligée d’être toujours en courses et en voyages. Elle fut nourrie à deux petites lieues de Genlis, dans un village appelé Comanchon. Que de sentimens nouveaux me fit éprouver le bonheur d’être mère ! que j’aimois cette enfant ! que la vie me devint chère, et avec quel vif intérêt je jetois les yeux sur l’avenir, auquel je n’avois jamais pensé ! J’y découvrois une nouvelle existence mille fois préférable à la mienne propre.

Neuf jours après mes couches, madame la maréchale d’Estrée vint me voir, elle m’apporta, en présent, de très-belles étoffes des Indes, et m’annonça que son père et sa mère me recevroient avec plaisir, et que madame de Puisieux me présenteroit à la cour aussitôt que je serois relevée de couches. Au bout de cinq semaines j’allai chez madame de Puisieux, dont j’avois une peur extrême ; comme de ma vie je n’ai fait des avances quand on a eu de la sécheresse pour moi, je fus très-froide et très-silencieuse. Je ne lui plus guère. Huit jours après, elle me mena à Versailles, ce qui fut un vrai supplice pour moi, parce que ce