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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/311

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elle, tâchoient de lui donner des ridicules ; j’en cherchai la raison, et, quoique j’eusse peu d’expérience, je la trouvai. Toutes ces dames étoient, au fond de l’âme, jalouses de la beauté de madame de La Reynière, de l’extrême magnificence de sa maison, et de la riche élégance de sa toilette. Cette découverte me serra le cœur et me fit faire de tristes réflexions sur le monde. Madame de La Reynière voyoit la meilleure compagnie ; elle avoit pour amie intime madame la comtesse de Melfort, une très-belle personne, dont elle étoit sincèrement aimée. Elle étoit aussi intimement liée avec la comtesse de Tessé : cette dernière, qui vit encore, a de l’esprit, mais le sait trop, et met trop d’empressement à le montrer, et, afin d’en donner meilleure opinion, elle parle un langage particulier, qui auroit souvent besoin d’interprète : elle et madame d’Egmont la jeune sont les dernières femmes minaudières que j’aie vues dans le grand monde ; les mines et les mouches étoient déjà passées de mode pour les femmes de l’âge que j’avois alors. M. de Tessé étoit l’homme du monde le plus froid et le plus taciturne[1]. Il fit bâtir un beau

  1. M. de Froullay, comte de Tessé, grand d’Espa-