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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/315

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Géorgiques de Virgile. Il avoit alors vingt-six ou vingt-sept ans. Il vint chez moi plusieurs fois, il travailloit dès lors à l’Énéide. Je le trouvai naturel et fort aimable, il avoit une laideur spirituelle, amusante à considérer ; dès ce temps, il disoit les vers d’une manière charmante, et qui n’appartenoit qu’à lui. J’étois fort liée avec madame de Louvois, qui me fit faire connoissance avec la comtesse de Custine sa sœur.

Madame de Lôgny, l’une des plus riches veuves de la finance, eut une conduite plus que légère, dont le scandale même devint apparemment une leçon morale pour ses deux filles, qui furent, l’une et l’autre, deux personnes si vertueuses et si parfaitement irréprochables ; l’aînée, qui épousa M. de Louvois[1], étoit

  1. M. de Louvois avoit toujours eu l’esprit un peu léger : étant à Brest à dix-huit ans avec beaucoup de dettes et sans argent, il écrivit à son père ; et, ne recevant point de réponse, il vendit tous ses habits pour fournir aux frais de son voyage, ne gardant, pour toute garde-robe, qu’un mauvais frac usé ; et il partit pour se rendre au château de Louvois, où le marquis de Souvré, son père, passoit tout l’été. M. de Souvré le reçut très-mal, et dans les premiers jours M. de Louvois n’osa pas lui renouveler