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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/352

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la plaignois sincèrement, la croyant dans la situation du monde la plus violente. Quant à M. le duc d’Orléans, elle me disoit qu’elle avoit pour lui une tendre amitié, et qu’elle faisoit tous ses efforts pour le guérir d’une passion malheureuse. J’avoue que je ne croyois pas cela, car le contraire sautoit aux yeux ; mais je n’attribuois sa conduite avec lui qu’à sa coquetterie naturelle, et je ne lui supposois pas le moindre dessein d’ambition. Monsigny, l’un des plus honnêtes hommes que j’aie connus, et qui avoit beaucoup d’esprit naturel, se passionna pour ma voix et pour ma harpe, et venoit tous les jours faire de la musique avec moi dans ma chambre. Je pris de l’amitié pour lui ; nous causions tout en faisant de la musique ; il me contoit beaucoup de petites choses curieuses, et il m’en dit une qui me parut surprenante. C’est que ma tante lui avoit recommandé en secret, ainsi qu’à Sédaine, de ne lui donner que des louanges aux répétitions (où se trouvoit toujours M. le duc d’Orléans), et de ne lui donner des avis qu’en particulier ; elle disoit que cela l’encourageoit. Monsigny et Sédaine pensoient bien qu’il s’agissoit de la faire valoir auprès de M. le duc