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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/39

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Cette singulière nourriture, qu’on appelle, en Bourgogne, de la miaulée, réussit parfaitement : avec l’apparence de la délicatesse, je pris une très-bonne santé. J’éprouvai dans mon enfance une suite d’accidens fâcheux. À dix-huit mois je me jetai dans un étang, on eut beaucoup de peine à me repêcher ; à cinq ans je fis une chute, j’eus une grande blessure à la tête : comme elle rendit plus d’une palette de sang, on ne me fit pas saigner ; un dépôt se forma dans la tête, il perça par l’oreille au bout de quarante jours ; et, contre toute espérance, je fus sauvée. Peu de temps après, je tombai dans le brasier d’une cheminée ; mon visage ne porta point, mais j’ai conservé toute ma vie deux marques de brûlures sur le corps. Ainsi fut en danger tant de fois, dés ses premières années, cette vie qui devoit être si orageuse !

Mon éducation a été si extraordinaire, que je ne puis m’empêcher d’en rendre compte ici. Mon père vendit la terre de Champcéri (je n’avois alors que deux ans). Il possédoit une maison à Cosne, il alla s’y établir, et y passa trois ans. Le souvenir de cette maison, de son superbe jardin et de sa belle terrasse sur la Loire est resté ineffaçablement gravé dans